Philipp Otto Runge et le paysage. La notion de "Landschaft" dans les textes de 1802

Élisabeth Décultot

pp. 39-58

Les réflexions de P. O. Runge sur le paysage, essentiellement ébauchées en 1802, reposent sur une dialectique entre peinture d’histoire et paysage. Runge cherche tout d’abord, dans le prolongement d’un mouvement amorcé au xviiie siècle, à contester la hiérarchie classique des genres et à opposer au primat de la peinture d’histoire celui du paysage, en s’appuyant sur des arguments d’ordre à la fois historique (nécessaire convergence de l’histoire de l’art vers l’avènement du paysage) et religieux (supériorité de la nature sur l’homme depuis la Genèse). Mais, loin d’opposer frontalement paysage et peinture d’histoire, il réalise plutôt une synthèse entre les deux : la représentation humaine continue pour lui d’être la finalité cachée du paysage. Cette conception du paysage comme symbole de l’homme suppose l’invention d’une sémiotique nouvelle qui participe de la quête romantique, notamment évoquée par F. Schlegel et par Novalis, d’une nouvelle « mythologie ». Les critiques ouvertes de F. Schlegel envers la nouvelle symbolique rungienne de la nature montrent cependant que, s’il y a accord romantique sur la nécessité théorique d’un renouvellement symbolique, l’élaboration concrète de cette symbolique pose problème. L’opposition Schlegel/Runge préfigure un antagonisme profond entre le mouvement nazaréen, qui entend prolonger le genre historique religieux du Moyen Age et de la Renaissance, et l’esthétique du paysage telle que l’ont ébauchée et pratiquée Runge ou C. D. Friedrich.

Publication details

DOI: 10.4000/rgi.452

Full citation:

Décultot, �. (1994). Philipp Otto Runge et le paysage. La notion de "Landschaft" dans les textes de 1802. Revue germanique internationale - ancienne série 2, pp. 39-58.

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